Amnesty
International a appelé Israël, le jeudi 31 août,
à fournir sans délai les cartes des régions du
Liban dans lesquelles des bombes à
sous-munitions ont été utilisées au cours du
récent conflit, afin de faciliter leur
enlèvement et d'empêcher de nouvelles victimes
civiles.
L'organisation a rendu publics les témoignages
de victimes de bombes à sous-munitions qui
n'avaient pas explosé au moment de leur impact
et appelé Israël à coopérer à une enquête
impartiale et approfondie sur l'utilisation de
ce type de munitions au cours du récent conflit.
Ces appels
interviennent après la publication d'un rapport
des Nations unies qui a révélé que 90 p. cent
des frappes israéliennes utilisant des bombes à
sous-munitions se sont produites au cours des
dernières soixante-douze heures du conflit,
alors qu'un cessez-le-feu était en vue.
Le Centre
de coordination de l'action contre les mines des
Nations unies a identifié à ce jour plus de 400
points contaminés par plusieurs centaines de
milliers de petites bombes contenues dans ce
type de munitions.
Les
délégués d'Amnesty International au Liban ont
trouvé d'innombrables bombes à sous-munitions
non encore explosées dans les villages et même
parfois dans les maisons.
«
L'utilisation de bombes à sous-munitions au
coeur de zones habitées viole clairement
l'interdiction de toute attaque menée sans
discrimination et constitue donc une grave
violation du droit international humanitaire, a
déclaré Kate Gilmore, secrétaire générale
adjointe exécutive d'Amnesty International. Il
est scandaleux qu'en dépit des demandes
officielles des Nations unies, Israël n'ait
toujours pas fourni de cartes pour les régions
visées par des bombes à sous-munitions. Cette
situation met en danger la vie de civils
libanais, d'enfants en particulier. »
Les bombes
à sous-munitions libèrent en l'air plusieurs
centaines de petites bombes sur une large zone.
Ces bombes n'explosent pas nécessairement lors
de leur impact, faisant ainsi planer une menace
durable pour la population civile.
« Les
bombes à sous-munitions sont de fait des mines
antipersonnel. Leur utilisation par l'armée
israélienne au Liban a déjà fait de nombreuses
victimes parmi les centaines de milliers
d'hommes, de femmes et d'enfants qui cherchaient
à regagner leur domicile. Les États-Unis
d'Amérique, principal fournisseur d'armes à
Israël, ainsi que les autres pays ne devraient
plus fournir ce type d'armes et devraient
décréter un moratoire international sur leur
utilisation », a déclaré Kate Gilmore.
Une
mission d'Amnesty International actuellement au
Liban a parlé avec certaines des victimes de
bombes à sous-munitions parmi les centaines de
milliers de civils qui tentent actuellement de
regagner leur domicile dans le sud du Liban.
Abbas
Yusef Shibli, six ans, a décrit aux délégués d'Amnesty
International ce qui s'est passé quand il a
tenté de ramasser une bombe à sous-munitions qui
n'avait pas explosé dans le village de Blida, le
26 août. De son lit d'hôpital, Abbas a expliqué
qu'il était en train de jouer avec trois
camarades ; il avait voulu ramasser un objet qui
ressemblait à une « bouteille de parfum » .
Abbas a été victime d'une rupture du colon et de
la vésicule biliaire, il a un poumon perforé, le
nerf médian a été touché, il a déjà subi
deuxtransfusions sanguines. Ses trois camarades
ont aussi été blessés, mais ont quitté l'hôpital
au bout de deux jours.
Dans la
chambre voisine, Mahmoud Yaqoub, trente-huit
ans, berger, est allongé, une jambe dans le
plâtre après avoir marché sur une bombe à
sous-munitions. Mahmoud dit avoir perdu quatre
de ses 21 chèvres au cours des attaques
israéliennes parce que les bêtes ne pouvaient
accéder à l'eau. Il ne pouvait que rarement les
faire sortir durant les combats ; maintenant que
le cessez-le-feu est en vigueur, des bombes à
sous-munitions se trouvent sur toutes les
collines qui leur servent normalement de
pâturage.
Dans un
autre hôpital, les délégués d'Amnesty
International se sont rendus au chevet de Hassan
Hussein Hamadi, treize ans, dans le coma après
avoir subi une intervention chirurgicale. Selon
sa famille, Hassan Hussein et ses cinq frères et
soeurs jouaient dans la cour de leur maison dans
le village de Deir al Qanun, au sud de Tyr.
Hassan Hussein aurait ramassé une petite bombe à
sous-munitions qui aurait explosé. L'explosion
lui a arraché quatre doigts de la main droite,
sauf le petit doigt et il souffre de lésions
importantes à l'épaule et à l'abdomen.
Hussein
Qaduh, dix-neuf ans, étudiant en comptabilité à
l'Institut technique islamique de Beyrouth a été
gravement blessé par l'explosion d'une bombe à
sous-munitions le 28 août, dans le village de
Soultaniye, au sud du Liban, alors qu'il suivait
une allée près du terrain de football, dans le
village. Lorsque les délégués d'Amnesty
International se sont rendus sur place le
lendemain, ils ont constaté que l'endroit était
parsemé de bombes à sous-munitions non
explosées, certaines à quelques centimètres de
l'allée sur laquelle on voyait encore des traces
de sang. Hussein, victime d'une hémorragie au
niveau des intestins et du foie, a subi une
importante intervention chirurgicale.
L'hémorragie a pu être stoppée mais des
saignements persistent au niveau du cerveau. Son
pronostic vital est extrêmement réservé.
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